Quelques mots sur le mouvement des squats "politiques" en France

Submitted by admin on Fri, 2006-07-07 12:05.

Depuis quelques années, nous pouvons constater en France le développement d'un mouvement de centres sociaux et politiques squattés, où sont souvent mis en pratiques à la fois des expériences de vies collectives et des activités politiques publiques de diverses sortes.

On retrouve régulièrement dans ces lieux, l'organisation d'évènements et d'actions anticapitalistes et anti-autoritaires, des zones de gratuité où s'échangent librement des biens et matériaux, des potagers squattés, des cybers cafés et du militantisme autour de l'informatique, des logiciels libres et des médias indépendants, de la diffusion d'information et éditions de livres et brochures autour d'infokiosques, des espaces de travail et d'échanges de savoir sur les médecines alternatives, les vélos, la mécanique, le travail du bois ou du métal, la sérigraphie, l'autoconstruction, le recyclage d'huile de tournesol pour les véhicules, l'échange de graines, des espaces entre femmes et pratiques féministes, queer ou transgenres, des repas de quartiers, des espaces de restaurants, bars, concerts, débats, projections ou théâtre...

Ces espaces se différencient d'une certaine mouvance dite de « squats d'artistes » (surtout présente en région parisienne...) en tant qu'ils ne recherchent pas à collaborer avec les pouvoirs publics et s'inscrivent généralement de manière explicite dans une lutte de remise en cause de la propriété privée, de l'Etat, des rapports de pouvoir et de profits et cherchent à construire des zones d'autonomisations en liens avec divers autres mouvements sociaux.

Ceci n'est qu'une vision partielle et grossière d'une situation complexe et il serait par ailleurs faux de chercher à trop unifier des expériences dont les idées et activités sont relativement diversifiées, et qui ne se voient pas forcément toutes comme partie prenante d'un mouvement plus large.

Il y a eu à ce titre quelques rencontres nationales intersquats il y a trois ans et plus depuis. D'un autre coté, les associations locales intersquats sont assez fréquentes et il y a beaucoup d'échanges entre les squats à travers le pays par le biais de projets et d'actions spécifiques, d'amitiés bien sur, et de réseau dans lesquels s'activent des squatteurs-euses comme : sans-titre (qui regroupe aussi des collectifs ruraux...), le réseau infokiosque, le réseau indymedia, les festivals de résistance, le réseau anti-carcéral ou encore des projets nomades comme la Caravane Permanente. Les liens existants ont déjà permis des offensives communes comme le 25 février 2005 où des actions surprises ont été menées dans 17 villes en France dans des locaux et Mairie du Parti socialiste pour protester contre les expulsions.

Malgré les tentatives de répression croissantes des autorités françaises vis à vis de ces squats politiques - le gouvernement a par exemple cherché à transformer l'occupation « sans droit ni titre » en délit dans le set des Lois de Sécurité Intérieure il ya deux ans - il est heureusement encore généralement possible de squatter sans se faire emprisonner en France. Si la justice donne quasi-systématiquement raison aux proprios et ordonne l'expulsion, les squatteurs-euses peuvent régulièrement espérer quelques mois (ou quelques années...) de délais quand ils/elles se battent légalement et surtout sur le terrain public et politique. Si les expulsions sont nombreuses, elles occasionent de nombreuses actions de résistance et de réouverture rapides dans certaines villes.

Au cours des dernières années, quelques squats ont même réussi a stopper momentanément les menaces d'expulsion qui pesaient sur eux et à trouver une certaine stabilité suite à des rapports de force conséquents et quelquefois aussi en concédant quelques négociations avec les propriétaires (ce qui est l'objet de nombreux débats...). On peut citer par exemple le cas de l'Espace autogéré des Tanneries à Dijon, du Clandé à Toulouse ou du 102 à Grenoble qui sont tous là depuis plus de huit ans.

D'un autre coté, beaucoup des squats les plus actifs de ces dernières années comme les 400 couverts à Grenoble, les Diables bleus à Nice ou encore l'Ekluserie à Rennes ont été expulsés dans la dernière année. Tandis qu'à Paris, la Mairie socialiste ne se soucie même plus des procédures légales pour expulser, d'autant plus depuis l'instrumentalisation d'incendies d'immeubles de sans-papier-e-s l'été dernier. Il apparaît donc vital pour le mouvement de créer à temps un rapport de force conséquent à l'échelle nationale et par ailleurs de continuer à multiplier les alliances et coopérations en dehors du milieu squat.