Urbanisation

Submitted by admin on Fri, 2006-06-23 10:15.

Ce thème sera traité lors du moment décentralisé à Toulouse.

Urbanisation : aménager un espace de vie, construire une offensive face à une politique de cloisonnement social

L'espace s'aménage, se construit avec des objectifs liés à des visions sur la gestion d'une vie en société. L'urbanisation est ainsi directement liée à la relation aux autres, à une construction communautaire au sens large : comment définit-on un lien social, comment le construire dans le long terme, l'organiser de manière à ne pas se trouver dans la situation d'urgence sociale qui donne la part belle à des solutions sécuritaires ultra-répressives.

Cette dernière question fait justement référence à une réponse à donner face à une politique marquée par une volonté de pratiquer un cloisonnement social. L'exemple le plus flagrant est fourni par les nouveaux aménagements dans les banlieues ; construction de grands boulevards à sens unique permettant un bouclage plus efficace et rapide des quartiers, volonté de casser les communications de coursives entre barres d'immeuble ; ceci pour mieux appuyer une répression accrue vers les populations de ces quartiers à l'image des nouvelles lois LSI ou les projets d'établissements pour mineurs. Les nouveaux aménagements en centre-ville témoignent, quant à eux, d'un effort de limiter au minimum la vie dans la rue, symbole d'un contre-pouvoir face à un régime policier fort. Tous ces aménagements de l'habitat s'accompagnent d'arrêtés préfectoraux et décrets qui tendent à lisser le mode de vie des habitants dans le même sens.

Une des thématiques présentes à Toulouse lors de l'action mondiale des peuples traitera de ces questions d'urbanisme. Le but étant de réfléchir en commun à la construction d'un habitat d'ensemble permettant à un véritable lien social de se construire. Cette réflexion doit s'élaborer à l'aide d'exemples concrets d'expériences à la fois de contruction de nouveaux espaces urbains autonomes basés sur la solidarité entre habitants et aussi de confrontations avec la politique étatique de remodelage des espaces afin de cloisonner les habitants d'un même quartier mais aussi de fermer les liaisons inter-quartiers.

Critique d'une politique de logement social

Les cités jardins détruites au profit d'un habitat plus lisse et rentable à court terme

Prendre l'exemple des cités jardins ces dernières décennies et leur devenir à Toulouse démontre clairement que la logique d'un habitat sécurisé à court terme a remplacé celle d'un habitat de quartier organisé de manière à favoriser les liens entre les occupants. Le fait que ce sont des organismes à but de « promotion sociale » comme l'OPAC ou la Société des Chalets qui génèrent de telles politiques est d'autant plus choquant. Ces cités jardins organisées en petites maisons individuelles entourées de jardins individuels sont peu à peu remplacées par des maisons ou petites barres sans espaces verts, le tout dans un logique de cloisonnement des entités entre elles. Au final des opérations de remodelage, nous obtenons un gain de surface en rasant les jardins pour générer plus d'espaces d'habitat aux loyers surélevés dûs au surplus de gadgets sécuritaires (résidences surveillées, parcs résidentiels fermés ...). En face, quelles sont les pertes en terme de lien social et de solidarité dans le quartier ? Si nous nous plaçons sur un mode de communication / observation à court terme, les politiques de remodelage des quartiers seront approuvées autant de fois que l'on voudra chasser des populations ciblées. A long terme, on préférerait voir des quartier où des liens solides rattachent les habitants de leur habitat. Seulement, la solution à long terme a le désavantage de ne pas satisfaire le saint promoteur immobilier même si celui-ci porte l'étiquette de la « construction sociale ».

Les banlieues cloisonnées puis déplacées au gré de l'expansion économique

Dans les quartiers comme la Reynerie, l'urbanisation a un but affiché clair : contrôler. La construction de grands axes à sens unique pour entrer et sortir du quartier en est un exemple. Le bouclage du quartier est assuré de façon quasi instantanée comme ont pu témoigner les habitants de la Reynerie en 2005. Un camion de CRS à l'entrée et à la sortie du quartier pour fouiller systématiquement les populations à pressuriser durant plusieurs mois.
Pour pouvoir éviter tout risque de regroupement et d'organisation, on veut s'attaquer maintenant aux coursives, couloirs pouvant permettre un repli stratégique en cas d'intrusions des forces de police. Cet objectif s'accompagne aussi d'un pourrissement des barres d'immeuble. Casser les coursives signifie pratiquement de casser la barre du milieu sur les trois barres solidaires d'appartement. Les deux extrémités se détériorent alors peu à peu jusqu'à écoeurement des populations. L'urbanisme c'est aussi la gestion des espaces communs : difficile de créer une situation idéale dans des endroits où le ramassage des poubelles ne passe plus ou très peu. En bas de la fenêtre du Maire, c'est tôt le matin et tard le soir que trois types de camions oeuvrant pour la propreté des pavés du Capitole s'attachent à faire le boulot.
Ces quartiers sont menacés de voir leurs populations disparaître à cause du grand projet de ville le « GPV ». Créer des axes de communication, casser les vieilles barres pour faire resplendir l'aura technologique innovatrice de Toulouse jusqu'à la périphérie. La construction des nouveaux quartiers reculera un peu plus encore les populations les plus défavorisées, facilitant l'isolement de ces dernières quand la révolte soufflera. Durant les émeutes de novembre 2005, il était impossible d'accéder en métro ou en bus dans le quartier de la Reynerie à partir de 16 h, il fallait alors une heure et demie pour accéder au quartier du centre ville.

Les centre-villes, vitrines commerciales pour habitants passants, quand le rapport à l'espace se fait marchand

Au centre-ville, on transforme l'espace en vitrine géante, les coins où s'arrêter deviennent marchands : plus de places pour s'installer confortablement autrement qu'à la terrasse d'un café. À l'image d'un Douste Blazy qui promet à ses commerçants que Toulouse ne sera jamais complètement piétonnier pour éviter que des hordes de « marginaux » n'affluent sur la ville rose et son centre-ville tellement chic.
L'occupation de la rue est calculée là aussi pour le contrôle : lois sécuritaires interdisant les rassemblements en dehors des cadres festifs définis (fête de la musique, coupe du monde...), rénovation des places de manière à éviter les regroupements, rénovation des quartiers aux populations trop subsersives par rapport à la bourgeoisie qui consomme, elle, le centre-ville. Si les habitants décident de réellement prendre en main cette occupation de la rue, les forces de l'ordre tapent un grand coup comme lors de la fête de la Musique 2005 où beaucoup de personnes se sont rendues compte que rien n'était laissé au hasard dans leur occupation des pavés toulousains. Que dire de ce décret en vigueur dans la ville de Barcelone interdisant aux passants de déambuler sans but dans la rue la nuit tombée.

On l'aura compris la critique de l'urbanisme ne peut pas se faire de façon cloisonée quartier par quartier, cellule par cellule mais dans une vision d'ensemble.

Des pistes pour habiter autrement son espace

Le modèle de cellules autonomes communicantes, la notion de propriété privée/propriété d'usage

Déclarer l'autonomie des quartiers ne consiste pas à cloisonner les populations en communautés mais plutôt de proposer une indépendance des habitants d'un espace par rapport aux autres entités. La Reynerie est un exemple de cellules non autonomes en terme de services publics comme la distribution de courrier, les pôles d'activités sociales et culturelles, les services de ramassage d'ordures. Au contraire, le centre-ville, lui est dans une relation contraire cumulant l'ensemble des efforts de la communauté urbaine de la ville.
Ces cellules autonomes doivent obligatoirement avoir accès à des réseaux de communication facilités (transports communs, absence de boulevards à circulation rapide qui cloisonnent des quartiers empêchant le déambulage humain, espaces verts communs entre deux cellules permettant les rencontres autrement que dans un contexte urbain oppressant et marchand).
Ce principe de cellules autonomes permet surtout d'affirmer un principe simple : l'autodétermination pour quiconque quant à son choix d'habitat et sa manière de gérer son espace d'habitat. Cette autodétermination pour un ensemble d'habitats dans la façon qu'ils ont de communiquer, de pratiquer des liens de solidarité. A Toulouse, par exemple, ce droit est bafoué pour les habitants des cité jardins, les habitants de la Reynerie mais aussi pour les habitants du centre-ville qui voient leurs places situées près de chez eux devenir moins hospitalières.
Rappelons que nous faisons la différence entre propriété privée et propriété d'usage. Lorsque nous parlons d'autodétermination dans le choix de l'aménagement urbain, ce droit prévaut pour le propriétaire d'usage, la propriété privée ne peut pas être décisive dans le choix de l'aménagement d'un espace. C'est justement la confusion de ces deux types de propriété qui a été l'appui juridique pour justifier les nouvelles politiques d'urbanisme. L'OPAC propriétaire des cités jardins décide tout seul comment les habitants de ces cités doivent vivre. A nous seuls de juger des incohérences qui s'ensuivent.

Accéder à la Terre collectivement pour se confronter efficacement à une politique oppressante d'urbanisation

L'avantage d'accéder à la Terre collectivement ne puise pas son intérêt premier dans l'aspect financier. Le squatt échappe d'ailleurs à cet aspect. Aménager collectivement un espace c'est d'abord se construire suffisamment d'autonomie pour pouvoir garder un habitat conforme à ses aspirations tout en se confrontant à la politique urbaine actuelle. Seul, l'espace que l'on s'aménage se fait peu à peu grignoter par l'urbanisme extérieur. L'ilôt résistant construit perd peu à peu toute marge de manoeuvre pour pouvoir s'autosuffire et meurt sous la pression urbaine. Des systèmes d'accès à la Terre exitent déjà, de nouvelles manières sont à inventer encore, voir le texte d'accès à la Terre.

L'offensive face à cette politique violente d'urbanisation

L'espace nous appartient quand nous en faisons l'usage. Rien ne nous empèche de le squatter si ce n'est de subir une répression de plus en plus forte. A nous de faire valoir le droit relatif à la propriété d'usage. Paroles d'un grand-père d'Ariège : « La Terre est à celle qui la travaille » qui pourraient se transposer « L'espace est à celui qui l'aménage pour y vivre ». Aménager sa maison mais aussi l'espace avoisinant en commun parce que nous y vivons, croisons des gens tous les jours. Premier acte aussi de subversion par rapport à un pouvoir qui opresse des populations. Ce même pouvoir a peur de l'organisation pas des émeutes. Les évènements à Paris dans certaines cités en témoignent : bien souvent les volontés d'organisation entre populations des quartiers débouchant sur des manifestations pacifistes ont été autant réprimées que lorsque ces mêmes quartiers brûlaient.
Les actions sur les places publiques visant à réaménager, pour un temps dérobé, l'espace permet de capter l'attention du passant et de faire entrevoir les autres possibilités de l'utilisation d'un espace dont il s'est fait exproprier. Repas de quartier, bals sauvages, manifestations de nuit, fausses commémorations, expos sauvages, les idées ne sont pas manquantes...

Adapter son habitat à son environnement

Le principe de l'autoconstruction réside dans le fait de dire que l'habitat n'est pas l'affaire de spécialistes mais de qui veut imaginer son lieu de vie. L'autoconstruction nécessite une adaptation à son environnement par les matériaux utilisés pour la construction (récup en ville par exemple et matériaux locaux). La proposition qui sera faite lors de la rencontre à Toulouse sera de construire ensemble une maison contructible en matériaux récupérables dans leur ensemble en ville. (palettes, paille, terre, sable, grillage, bois).